L’origine des maux (!)
Posté par BernartZé le 9 juin 2009
Oooh…secours ?
Montant sur scène avec une tête de condamné à mort, il s’efforça tout d’abord de ne pas tituber.
Déjà que son teint livide allait très certainement faire merveille devant toute l’assemblée, pas question en plus de manquer une marche ou de s’emmêler les jambes en chemin !
Et pourtant….mon Dieu qu’il les sentait flageolantes ces deux-là !
A croire qu’il devait leur réapprendre à marcher « en public », comme par hasard aujourd’hui même !
Il s’était rarement senti aussi sûr…d’être à une embardée du précipice et de l’étalage intégral.
Il n’aurait tout bonnement jamais dû se lever de sa place à l’appel de son nom.
Mais d’ailleurs…était-ce bien son nom qui avait été prononcé et l’avait-il vraiment entendu ?!
Le doute, affreux.
Ce serait le comble du ridicule que d’arriver ainsi sans être le moins du monde attendu !
Il n’y survivrait pas, assurément.
Mais pourquoi n’avait-il pas plutôt fait semblant de ne pas entendre ?!
Comme s’il s’était trouvé ailleurs ou carrément pas là.
C’était tout de même pas si difficile d’avoir la présence d’esprit de ne pas réagir et de faire le mort avec un maximum de discrétion !
Quelle mouche l’avait donc piqué en lui inoculant l’envie d’aller faire le beau et de se pavaner sur cette scène !?
De toutes façons les mouches, à sa connaissance, n’ont pas de dard et n’inoculent rien du tout.
Ah oui ? Mais s’il se trompait ; et les mouches tsé-tsé alors ?…
Oh la la ! Et s’il s’écroulait brutalement, terrassé par une terrible envie de dormir ?
Après tout, ses deux dernières nuits n’avaient pas été de franches réussites ; il n’avait donc pas eu son compte.
Surtout rester vigilant et les yeux grands ouverts.
Ne pas laisser la panique envahir l’ensemble du cerveau jusqu’à adhérer étroitement à ses parois intérieures !
Un peu de tenue ; un minimum de cran que diable !!
Se contenter de mettre un pied devant l’autre, en s’assurant de la solidité du parquet, tout en progressant avec le plus de naturel possible.
Rien de plus facile.
Oui. Mais dans de tout autres circonstances !!
Du calme, du calme.
Et la peur dans cette aventure ?
Voire l’angoisse de ne pas être à la hauteur et celle de s’en montrer définitivement incapable, malgré des efforts louables et renouvelés avec une insistance plus que tenace.
Vite se souvenir pour se rassurer !
N’avait-il jamais été pris par un sentiment de panique auparavant ?
Chercher dans sa mémoire ; trouver vite de quoi se réconforter en se rappelant une occasion semblable où il avait réussi à maîtriser ses nerfs et cette terrible impression d’affolement galopante.
Euréka ! Pas plus tard que l’année dernière il avait, mine de rien, réussi à présenter tout seul le spectacle de fin d’année.
Il avait dû monter sur la scène du théâtre de la ville et faire face à tout le public, soit…(au minimum) l’ensemble des parents et divers membres des familles des participants.
Plus de cinq cents personnes, certainement, pour occuper les places d’une salle pleine à craquer !
Et il s’en était sorti plutôt très bien (selon les échos), réussissant -apparemment- à dissimuler un trac monstrueux qui l’avait empêché d’avaler quoi que ce soit dès le petit-déjeuner !
Un trou béant (à la place de l’estomac) l’avait escorté jusque sur les planches.
Mais ensuite, quelle faim gargantuesque n’avait-il pas ressenti !!
Il avait, cette fois-là, bien crû mourir sur place et s‘en était sorti comme par miracle, parvenant même à articuler tout son texte sans encombre.
Alors franchement aujourd’hui comparé à l’an dernier !…
N’empêche que, même en prenant son courage à deux mains, ce sera loin d’être de la tarte !
And the winner is…was…ne sera pas…; mais pourquoi donc as-t-il été appelé au fait ?!
Certainement pas pour recevoir une aussi prestigieuse récompense ; pas ici, pas dans ce patelin, pas à son âge !
Il est grand temps de reprendre (tous) ses esprits et d’avancer vaillamment sur la scène.
On lui indique la voie, à grands renforts de gestes peu discrets.
C’est sûrement par là que se situe le remettant, au beau milieu de l’arène, tout près du grand micro.
Quelqu’un à remercier ?
Ben…non, pourquoi ?!
Personne n’y est pour rien ; pas même lui, ou si peu !
Il n’avait pas pensé, pas osé espérer se retrouver là à l’issue d’une kermesse si peu héroïque.
Les sentiers de la gloire révèlent tant de traverses en chemin !
Un mot tout de même ?…
On lui descend le micro ; il réalise soudain qu’au delà de l’estrade il ne voit presque plus rien et surtout pas vraiment ce qui peut bien se passer dans toute la salle à laquelle il fait face, seul à présent.
Son brouillard est tombé, à temps pour le sauver.
Il reste muet, sans sourire, sans broncher, apparemment impassible.
On lui suggère, de loin, de se lancer, de commencer à dire, à réciter, à parler enfin.
Alors, il se décide et il se lance.
Ils cassent le monde à coups de marteau il cassent le monde en petits morceaux mais ça m’est égal ça m’est bien égal il en reste assez pour moi il en reste assez…
Tout le monde applaudit, tout le monde a l’air très content, sauf lui qui s’en veut affreusement d’avoir oublié de dire l’essentiel, soit le nom de l’auteur.
Ça n’intéresse, semble-t-il, personne, à moins que tout le monde ne le connaisse.
Oh, et puis… !
Du haut de ses trois pommes qui font 10 (ans), il a l’air heureux, simplement.
(© 2009/droits réservés)
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black hattitude.