Étrangement bizarre…
Posté par BernartZé le 26 juillet 2012
De l’extrême capillarité de la toile gaufrée
(Petit traité)
Un peu vulgaire, un peu gauche, la serpillière mérite pourtant une ode.
Tant elle rend de services, tant elle reprend de sévices à son compte.
Toujours en eaux troubles lorsqu’il s’agit d’éponger les dettes aqueuses des problèmes de plomberie.
Ses interventions salvatrices, rarement spectaculaires, font pourtant bon ménage avec les affaires courantes de la maison, surtout en cas de crise aigue.
Et quand un problème passager s’avère perdurer…
Entre en lice…tout l’arbre généalogique d’une même famille, les vivants comme les morts.
La cohésion, l’union, le soutien sans réserve fait que, sur le front, le bloc est assuré ; la solidarité est aussi naturelle que le lien qui les unit.
Comme au feu les pompiers, les serpillières se relayent et se laissent remplacer sans se soucier du moindre ego.
S’en suit une interminable ronde, une succession de passages de témoin pour tenter d’absorber le surplus ; au bout d’un nombre incalculable de tours de piste et de relais, bien au-delà du 4×100 mètres de dimension olympique…
Plutôt que de chanter ses louanges, tressons une couronne de laurier à la gloire d’un tissu capable d’absorber plus de dix fois le double du quart de sa masse corporelle !
A quelques chouïa près…
Au risque de se perdre, au péril de sa vie, il n’hésite pas à se gorger de liquide, sans jugement de valeur, sans songer à demander des comptes.
Il le fait ; un point c’est tout !
Au risque de…se faire prendre au test d’alcoolémie, en cas d’abus de boisson « à consommer avec modération ».
Quelle abnégation ! Quel sens du sacrifice !
Et de n’avoir de cesse de rendre le service qu’on attendait de lui…
Ce qui peut sembler naturel au plus grand nombre, ne l’est peut-être pas tout à fait.
Si la toile est joliment gaufrée (ainsi, c’est assez rare !), le tissu n’en demeure pas moins susceptible de ne pas filer droit.
Dans son souci de tout absorber, il ne fait pas le tri, gobant les mouches et les mochetés traînant à même le sol, sans
véritable discernement.
De quoi aveugler le plus myope des journalistes qui se piquerait soudainement d’en faire un événement !
Imaginez-le à la une du 20 heures…
« Aujourd’hui, grande première : une serpillière, pleine de (bonne) volonté et de dévouement, comme toutes celles de sa grande lignée, s’est sacrifiée au-delà de ce que l’on pouvait imaginer.
Elle a fait preuve d’une abnégation telle qu’elle s’est sabordée en tentant d’absorber une tortue de mer égarée jusque sur un parquet de bois laqué !! »
Aucune photo pour illustrer cet étrange phénomène ; les paparazzis étaient tous mieux occupés ailleurs.
La morale de cette histoire ?
Une toile de confection assez grossière peut révéler une âme délicate au point de laisser pantois les plus sceptiques et de servir des ouvrages chics et choc .
Quelle étrange forme de reconnaissance…
(© 2012/droits réservés)
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