Autre…
Posté par BernartZé le 25 janvier 2015
L’autre vie
Je n’oublierai jamais toutes les scènes répétées sur le quai en contrebas.
Sitôt l’escalier descendu nous pouvions nous emparer de cet espace de Seine.
Le travail sur le texte était d’autant plus amusant que seul le fleuve nous faisait face ; seul témoin de nos efforts, seul spectateur.
Le bonheur d’éructer n’était jamais aussi grand que là !
Avant que d’être tempérés les mots bondissaient librement en tous sens sans mesure ; forcément outrés.
Nous pouvions alors embrasser toute l’Ȋle Saint-Louis et tous les rêves étaient possibles.
Passé le temps de l’italienne et de l’allemande, l’heure la plus difficile était bien sûr de trouver la plus juste nuance sans perdre le bon rythme ; et de douter toujours…
Jamais satisfaits, quand l’incertitude finissait par prendre toute la place, le péril avant de retrouver le chemin de la classe virait à la crise d’angoisse.
Heureusement -en guise d’interlude- le passage nocturne d’un bateau-mouche nous donnait l’illusion d’un triomphe imminent sous les lumières et les spotlights !
L’aveuglement ne durait pas…
Quand il était temps de remonter en surface et de revenir à la réalité, le tract nous prenait avant même de franchir le porche , avant même de passer sur scène.
Et les soirs d’examen…le malaise vagal n’était jamais très loin.
Certains s’en sortaient brillamment, d’autres moins et plus tard au café les mines réjouies côtoyaient les visages torturés.
Et tous n’allaient pas dîner ensuite…
Tous n’ont pas poursuivi ce chemin, faute de persévérance de courage de talent ou d’opportunités.
Certains ont continué leur quête d’une autre manière, certains se sont égarés…
Tous ne recherchaient pas la gloire, mais la plupart une forme de reconnaissance vitale indispensable à leur (sur)vie.
Certains n’ont pas survécu.
Je n’oublierai jamais toutes les scènes répétées sur le quai en contrebas.
(© 2015/droits réservés)
J’aime beaucoup.
chromatisme d’enfance et d’adolescence.