Une « vie »
Posté par BernartZé le 14 avril 2017
Confusément
Si seule.
Elle la jouait ombrelle diaphane évanescente, légère en apparence.
Pensive et ailleurs elle avait perdu connaissance avec la réalité depuis un âge oublié.
Rien ne semblait la toucher ni l’atteindre.
Elle ne faisait plus que passer.
Elle se lançait toujours des défis insensés qui ne l’amusaient guère mais dont sa survie dépendait, croyait-elle.
Les relever ou pas finissait immanquablement par lui nuire et la faire replonger dans les eaux noires qui l’effrayaient tant.
Là tout n’était que chaos angoisse et peurs.
La sombritude des nuits menait droit à l’effroi et elle devait tous les matins se recomposer un visage pour faire bonne figure.
Elle trichait pour sauver les apparences, par politesse par bravade ou par égard pour elle, pour la femme qu’elle avait rêvé devenir.
Tout sentiment amer avait en elle disparu le jour où elle s’était avoué sa déroute.
Durant les années de lutte obstinée contre elle-même la petite fille avait grandi tout en refusant son corps et ses inévitables transformations.
Elle avait connu le pire dont elle avait cru réchapper par miracle sans savoir que son ennemi intime poursuivrait son travail de sape à maux couverts.
Cela l’avait empêchée d’être et de vivre, rognant progressivement son espace vital et la rendant tributaire de codes lui imposant de s’astreindre à des cérémonies funèbres.
Rien d’avouable ni de glorieux.
Son isolement s’était dessiné progressivement, sans heurts ni à-coups.
Avant même d’en prendre conscience elle avait perdu contact avec tous les amis qui lui étaient restés le plus longuement fidèles, lassés peut-être.
Ses parents étant morts, elle ne parlait plus qu’aux plantes vertes de la maison, principalement au chlorophytum (increvable, même sans eau) qui l’avait veillée tout au long de ses guerres.
Le téléphone ne sonnait plus et ses « conversations » anecdotiques ne se déroulaient que lors des passages aux caisses des supermarchés.
Rien de grave, juste un peu pathétique.
Seule la solitude…
(© 2017/droits réservés)
Si, si, le chlorophytum peut trépasser par manque d’eau, j’ai testé !