Le temps venu

Posté par BernartZé le 8 janvier 2017

The crying room

Chambre close

  

            Larmes ravalées elle avait refermé la porte à clé.

 

     Larmes bues après ses paroles et la relecture de ses lettres.

L’émotion du souvenir du dernier jour l’avait longtemps empêchée de reprendre son souffle et le cours de sa vie.

Plus rien d’autre n’avait compté durant de longs mois, des années.

Elle avait beau savoir qu’il valait mieux le laisser aller, elle ne parvenait pas à cesser de le retenir.

N’écoutant personne elle avait renoncé à toute vie sociale, préférant même rompre des liens familiaux.

Entretenir la flamme et les souvenirs était son seul souci tant sa survie en dépendait.

 

     De longs mois, des années, son existence était restée en pointillés.

Perdue et pâle T.T. (Missing) elle était retournée sur des lieux familiers, avait dérangé des photos, hanté le passé pour raviver la flamme.

Tout lui manquait : lui, eux, elle dans ses yeux.

 

     Le poids de l’absence avait été monstrueux, phénoménal au point qu’elle avait d’abord pensé ne jamais réussir à se relever.

Rester à terre n’étant pas une option sensée, elle avait fait de leur chambre un lieu fermé, une pièce de secours, un ultime recours.

Installée ailleurs pour tenter de dormir, il lui avait été impossible de ne pas y revenir régulièrement ; trop souvent.

Et de refaire chaque jour chaque nuit le trajet jusqu’à la chambre mortuaire où il était sans n’être plus.

Durant des heures elle voyait repasser des images, relisant des poèmes qu’ils avaient épousés et pleurait un peu tout en se contenant.

Durant des années ce cérémonial avait eu lieu.

 

     N’oubliant rien elle avait réussi à accepter de laisser sa place au vide dans cette pièce condamnée au passé.

Et elle l’avait une dernière fois refermée ; sans larmes.

 

            Plus tard, dans quelques temps, sans doute déménagera-t-elle…

  

 

La chambre verte (François Truffaut, 1978)

(© 2017/droits réservés)

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Vaines pensées

Posté par BernartZé le 21 décembre 2016

Libera me (2)

Libera me

  

            Si j’avais la Foi…

 

     Malheur aux athées dont le doute est la religion.

Mon enfant mon ami c’est au cœur de la nuit que je pense le plus à vous, vous que j’ai perdus, vous qui m’avez quitté.

Oui vos heures étaient sombres et vous aviez sans doute les raisons de choisir une autre voie, un raccourci.

Vous aviez trente ans et vos vies derrière vous ; vous n’imaginiez pas pouvoir aller plus loin.

A ces annonces espacées de deux décennies, je n’ai plus vu que des brouillards et des ombres déchirées Kai Kairos ; je n’entendais plus rien, c’était l’apocalypse.

Le soleil n’était plus qu’une tache claire dans un paysage en train de s’effacer.

Passèrent les jours de larmes qu’il me fallut passer ; mon piano m’a beaucoup aidé.

 

     Je n’ai jamais blasphémé ni fait preuve d’un quelconque mépris envers les choses religieuses.

Je ne suis simplement jamais parvenu à croire.

Trop cartésien ou bien stupidement incapable de recevoir sans comprendre j’ai moi aussi longtemps porté ma croix.

Aujourd’hui je suis seul avec vos souvenirs et mes regrets.

Ceux de n’avoir pas su deviner le mal hurlant que vous cachiez, le taisant par orgueil autant que par désespoir.

Je n’ai pas su être l’oreille que vous cherchiez, celle qui vous aurait peut-être soulagés.

 

            Mon enfant mon ami à présent je suis vieux et mes heures sont comptées.

Malgré le temps je n’ai jamais réussi à me libérer du poids d’une culpabilité qui m’a rongé tout au long de ma vie.

Si seulement je pouvais me délester !

 

     Le jour s’est levé, plus immense est ma nuit…

 

  

Lacrimosa - Requiem for my friend (Zbigniew Preisner, 1998)

(© 2016/droits réservés)

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Lettre au passé

Posté par BernartZé le 21 novembre 2016

Darvilim

Perdu de vue

  

            Que deviens-tu l’ami depuis que je t’ai laissé tomber ?

 

     Je t’avais inventé il y a près de quinze ans.

Sitôt créé tu avais décidé de partir, de tout quitter, à commencer par ton filin d’acier ; rompant l’équilibre entre vous les adieux avaient été déchirants le laissant orphelin.

 

Tu avais pris la route à pieds pour voir le monde, pour découvrir un autre horizon que celui du funambule que tu avais toujours été.

De là-haut les gens que tu ne connaissais pas semblaient petits mais si vivants.

Une véritable question de vie ou de mort tant tu n’en pouvais plus t’avait conduit à mettre pieds à terre ; cette impérieuse nécessité avait failli plus d’une fois te faire tout lâcher quitte à tomber à la renverse.

Parti à l’aventure le cœur battant tu avais vite réalisé que tu ne savais rien de la vraie vie.

 

Rattrapé en chemin par le prolongement d’acier de ton ombilic tu avais eu grand mal à le convaincre de rentrer seul à la maison après qu’il a tenté de t’hypnotiser puis de t’étrangler -par dépit- de ses propres Mains M. (extrait de l'affiche du film de Joseph Losey, 1951) ; tu t’es reproché alors de le maudire un court instant.

Autant qu’il m’en souvienne au cours de ton long périple tu avais fait quelques rencontres marquantes, découvrant l’amitié et même l’amour.

Toi qui ignorais le sens du mot « convivialité » tu t’étais retrouvé chaleureusement accueilli par une famille de paysans qui t’avait proposé logis couvert et feu de cheminée.

Épisode marquant, difficiles adieux.

Mais toujours te poussait le besoin de repartir pour apprendre ailleurs.

 

Et sur une plage un soir cette inconnue rencontrée t’avait offert -quelques jours plus tard- ton premier Noël et ta première montre bracelet Montre bracelet.

Tendres moments, maladresses et touchantes hésitations.

 

     Rêves de voyages, voyages en songes ; cinquante-quatre jours de coma après ta chute vertigineuse tu t’étais réveillé dans cette chambre d’hôpital sous le regard bienveillant d’une infirmière de nuit que tu avais cru reconnaître.

Quelques fractures, des ecchymoses, mais surtout la stupéfaction d’être plus que jamais vivant.

Le champ des possibles était grand ouvert.

 

            Qu’as-tu fait depuis ce temps qui me paraît tellement lointain que je doute aujourd’hui de ton existence.

Si tu peux écris-moi, donne-moi de tes nouvelles ; je suis presque sûr que tu as su te relever pour disposer de ton avenir.

(je t’embrasse Embrace sculpture)

 

  

 

Œuvre mornée  (roman non publié)

 

(© 2016/droits réservés)

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Mauvaise « tac tic »

Posté par BernartZé le 15 juillet 2016

Un dimanche après-midi à l'Île de la Grande Jatte (Georges Seurat, 1884-1886)

Je haïssais les dimanches

  

            Dès le premier réveil comateux Les matins comateux la dérive commençait.

Il fallait pourtant bien finir par se lever.

 

     S’extirper du lit fatigué et gris comme un lendemain de réveillon dont on ne garde que l’amertume était en soi un immense effort nécessitant une grande volonté.

Le corps semblait lourd, les muscles atrophiés n’aidaient pas à retrouver un semblant d’énergie pour faire bonne figure ; pas davantage l’envie de sourire que de parler.

Mieux valait éviter de croiser quiconque avant le déjeuner.

La matinée passait, infructueuse.

Assis hagard au bureau le premier travail consistait à se sortir de cet état de torpeur proche de la léthargie.

L’hébétude durait des heures semblant repousser les limites de la passivité intellectuelle.

Impossible de commencer à travailler, tout juste le courage de jeter un œil au programme du jour ; priorité donnée aux leçons et devoirs bien sûr.

Et l’esprit, afin de fuir ses responsabilités, s’évadait.

Mais c’était quoi cette horrible tapisserie qui faisait face OLYMPUS DIGITAL CAMERA ?

Des papillons écrasés à figures de gommettes, des trèfles à quatre feuilles ou bien des fleurs à cœurs carrés ?!

Un vrai cauchemar ces couleurs qui n’en étaient pas ; de quoi rendre neurasthénique n’importe quel gai luron ; davantage quelqu’un d’une nature plus sombre.

Tiens ce livre en cours de lecture qui attendait d’être repris en mains, pourquoi ne pas en lire quelques pages ?

Et puis où en était resté le journal ?

Les matinées des dimanches passaient infructueuses.

 

     Sitôt la table du déjeuner débarrassée, retour à la case départ avec l’impérieuse nécessité de se mettre -cette fois- sérieusement au travail !

Se concentrer, ne plus se disperser faute de temps et soudain la prise de conscience qui déclenchait toujours la même angoisse : celle de ne pas y arriver.

Le devoir de maths laissé en plan la veille, la dissertation qui demandait réflexion depuis plus d’une semaine que le sujet avait été donné ; et puis quelques menues révisions en vue de la journée du lundi.

La problématique du dimanche n’était absolument pas liée à l’idée de retourner en cours le lendemain, bien au contraire quand on a plaisir à retrouver ce théâtre vivant, mais à la crainte la peur et l’angoisse de n’avoir plus assez de temps pour être prêt à commencer une nouvelle semaine.

Problème d’organisation et de logistique ; encore et toujours cette fameuse procrastination !

Cette mortelle tendance à passer plus de temps à prendre son élan qu’à passer à l’action finissait inévitablement par faire basculer le reste de la journée dans un état d’anxiété croissante qui prenait sa pleine mesure dans la soirée et parfois jusque très tard dans la nuit.

La peur au ventre capable de provoquer des crises de panique menant à un degré de stress susceptible de faire sauter les plombs Brain stressed devenait paralysante.

Il fallait pourtant l’ignorer, non sans mal, pour travailler enfin.

 

     Tournaient les heures ; passé minuit le compte-à-rebours était lancé Compte à rebours.

Il fallait penser et écrire vite, faire appel à toutes les forces du cerveau pour achever à une heure indue ce qui aurait déjà dû l’être au moins depuis la veille.

Il aurait tellement mieux valu pouvoir partir en promenade en famille dans l’après-midi en pleine nature ou au bord d’un lac.

Mais non, cela ne se passait jamais autrement et le dernier couché à pas d’heure était toujours le même.

Qui donc chantait autrefois sa haine rageuse des dimanches ?

Ah oui ! La muse de Saint-Germain-des-Prés Muse de St Germain.

Mais c’était pour de toutes autres raisons.

 

            Quand l’impatience du lendemain devient affolante on fait parfois n’importe quoi.

 

 

Je hais les dimanches - Juliette Gréco (1952) 

(© 2016/droits réservés)

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Histoire et conséquences

Posté par BernartZé le 6 juin 2016

Croquis (de Marie Meesters)

Les hommes ne sont pas raisonnables

(les femmes non plus d’ailleurs)

  

            Je me souviens d’un village de l’Hérault où je ne suis jamais allé.

     Il se trouve près d’un lac ou d’un étang peut-être.

 

     Sept ans avant de la rencontrer je n’étais pas passé très loin (à peine plus d’une soixantaine de kilomètres à vol d’oiseau) de son havre de paix de moins de huit-cents habitants ; sans le savoir bien sûr.

J’étais jeune plein de courage et d’allant ; c’était l’été.

Je m’étais mis en tête de parcourir la France en stop (au grand dam de mes parents !) du nord au sud, en dessinant approximativement une boucle me ramenant au point de départ ; le tout en une semaine.

Sans doute étais-je plus inconscient que téméraire ; j’avais surtout un irrépressible besoin de m’évader, pour respirer enfin.

En chemin j’ai levé le pouce un peu partout (même sur des autoroutes) et par tous les temps ; j’ai appris la patience et à trouver refuge dans des endroits les plus divers et incongrus où il n’était pas facile de fermer l’œil sans être inquiet.

J’ai bien sûr dû dormir à la « belle » étoile, y compris sur un rond-point Rond-point sous un arbre.

Bref.

Je fus largué en pleine nuit vers trois ou quatre heures du matin à environ cinq kilomètres de mon point de chute ; un coin soi-disant chic et à la mode mais surtout tape-à-l’œil.

Il faisait nuit, il faisait noir, j’étais fatigué et j’avais oublié ma lampe-torche sur l’étagère du haut du placard de l’entrée.

J’ai marché plus ou moins au hasard, en essayant de distinguer (mes lentilles de vue manquaient d’eau) les lumières du bord de mer au lointain en contrebas.

Je ne sais plus comment j’ai réussi à trouver le chemin jusqu’à une terrasse de café où je me suis affalé ; il n’était plus d’heure, celle où il était encore ouvert avant de fermer le temps de faire le ménage pour vite rouvrir à celle des croissants chauds.

J’ai dormi -hors de question de prendre une chambre d’hôtel, autant par éthique que faute de moyens- sur la plage durant trois nuits.

Le sentiment d’insécurité permanente était compensé au lever du soleil par la vue d’un spectacle indescriptible empli de fatigue et d’émerveillement ; suprême récompense !

Cette épopée en forme d’échappée belle ne dura que le temps qui lui avait été imparti.

Le temps de retourner à ma vie d’étudiant.

 

     C’est des années plus tard, quand ma vie « active » était censée m’emplir de joie et de satisfactions, que nos chemins se sont croisés en ville (sans vue sur la mer) par hasard.

Celui des rencontres indirectes : l’amie d’un ami…

Ainsi nous nous sommes connus, bien loin de son village où tous l’appelaient « Mademoiselle » comme si son état civil l’avait privée d’un prénom officiel.

Elle était…elle ; j’ignore quelle fut sa première impression en me voyant.

Elle était unique, passant de l’ombre à la lumière ; souvent en équilibre sur un fil dangereusement tendu.

Nous devinrent vite amis je crois, dans des circonstances particulières.

Les années ont passé, elle s’est rassérénée, trouvant un arrangement l’obligeant peut-être à faire le deuil de certains rêves.

Elle a changé de ville, deux ou trois fois, emportant sa petite famille en bandoulière.

 

     Après deux décennies au cours desquelles nous nous sommes de moins en moins vus (quelques trains pris cependant), régulièrement écrits et téléphonés, nos routes se sont éloignées Des routes.

L’usure du temps, la fatigue, des intérêts divergents ?

L’âge peut-être…

Je lui avais toujours dit (prédit) que les chemins qui se croisaient se décroisaient un jour ; je n’avais apparemment pas tort.

 

            Des routes, déroute…

J’ignore si elle est toujours en vie, elle ne sait pas davantage que je pense encore à elle.

Retourne-t-elle parfois dans son village ?…

  

 

L'Hérault  (jeu de piste)

(© 2016/droits réservés)

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Comme un parfum de fin du monde

Posté par BernartZé le 7 mai 2016

Rien à dire

Pas grave

  

            Je n’ai pas envie d’écrire.

            J’ai juste envie de mourir, mais c’est pas grave.

 

     À force de jeux de je et de moâ cachés derrière les mots, il y a de quoi perdre de vue l’idée initiale qui n’était pas de parler de soi mais des autres.

Tendre à tous un miroir pour suggérer que si nous sommes différents nous avons bien des points communs ; d’où l’importance des nuances.

Mais l’heure est-elle encore aux dégradés de couleurs Dégradé de couleurs et à l’étude des multiples sens des mots de notre langue supposée riche ?

Plus le temps de jouer sur toute la gamme des tons, tout doit aller vite pour communiquer de plus en plus avec un minimum de signes.

Bientôt viendra peut-être le jour où il suffira de s’envoyer des « photos » (!) et des émoticônes pour nous parler ; et la forme aura définitivement pris le pas sur le fond.

Tristes tropiques Tristes tropiques - Gérard Manset (Revivre, 1991) (« Ne pas singer les autres, faire comme si / Ne pas aller dansant de façon mécanique ») !

 

     Ce n’est vraiment pas grave si un simple plumitif que personne ne lit n’écrit plus faute de n’avoir plus rien de nouveau à dire.

L’absence de talent nuit non seulement à sa santé mais aussi à celle des autres qui se fichent pas mal de ses sautes d’humeur et de ses borborygmes.

Pourvu que la couche d’ozone ne soit pas mise en péril lors de l’autodafé Autodafé !

Une fois les bases du langage humain oublié il nous restera d’autres façons de nous exprimer, en se tapant les uns sur les autres à coups de gaule ou de massue Massue (têtes de morts) tels nos ancêtres par exemple.

La raison du plus fort servira de seul argument pour prendre à nouveau le dessus sans palabres inutiles.

« Jadis et naguère » Jadis et naguère - Gérard Manset (1998) sont d’un temps révolu dont nul ou presque ne se souvient ; d’une logique évidente pour qui veut aller de l’avant.

Si le monde devient fou nous en boirons le jus jusqu’à la lie sans autre échappatoire que la mort.

Tant pis pour ceux qui resteront à la traîne.

 

            Il sera alors temps de se taire et de renoncer à partager des mots que l’on croyait universels.

Il sera temps de se pendre à son cou et de lâcher du lest…

 

  

Revivre - Gérard  Manset, 1991  Nouveau monde  Vers un nouveau monde ?…

(© 2016/droits réservés)

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L’œuvre du temps

Posté par BernartZé le 4 novembre 2015

Djeuns

Mise-à-jour du passé

  

            Les jeunes (djeuns ?) sont surprenants quand ils trouvent le temps de se souvenir que leurs aînés ne sont pas tous déjà morts et enterrés.

 

     Qui n’a pas été négligent, qui n’a pas oublié d’écrire à ses grands-parents en pensant qu’un autre jour, il serait toujours temps ?

Et puis certains sont morts et il était trop tard pour leur écrire leur répondre donner de ses nouvelles en les embrassant.

Au siècle dernier on écrivait encore avec une Plume (2) - Copie et de l’encre ; quelle veine pour grand-maman (veuve de surcroît) qui dans sa boîte-aux-lettres découvrait une enveloppe et reconnaissait l’écriture d’un de ses petits-enfants.

Elle avait le loisir de la lire et de la relire en oubliant un court moment ses peines et sa solitude ; les enfants et les adolescents ne devinent pas combien ils peuvent faire chaud aux cœurs oubliés.

Et dire qu’un égard aussi simple pouvait prolonger une vie.

Même un petit bonjour d’un goût discutable Carte postale - Port la Nouvelle suffisait parfois à susciter un bref bonheur.

 

     Ne sommes-nous pas tous coupables de tels manquements mis sur le compte de l’insouciance et de la jeunesse ?

Inconscients, ne sommes-nous tous pas un peu responsables des morts que nous avons accélérées ?

 

            Tout cela est sans doute dans l’ordre des choses

  

 

Bouquet chrysantèmes  Trop tard !

(© 2015/droits réservés)

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Ni remords ni…

Posté par BernartZé le 11 septembre 2015

Les Chalets de Gruissan

Le train de 6h07

  

            Il était tard cette nuit-là ; il était tôt quand il décida de partir.

 

     Le temps de jeter quelques affaires dans le premier Sac de voyage trouvé au bas de l’armoire de l’entrée et il s’était engouffré dans le métro qui heureusement roulait déjà.

Vite direction la gare Paris-Gare de Lyon la plus proche située à seulement trois stations de chez lui !

Un coup d’œil au panneau d’affichage des trains en partance ; juste le temps de se tordre un peu le cou pour le lire sans besoin d’hésiter et hop une CB rapidement insérée dans la borne libre-service ; c’est si pratique de ne (presque) pas réfléchir !

La destination s’était d’elle-même désignée ; le premier train serait le bon pour partir au plus tôt.

A peine si en montant il savait où le voyage le mènerait.

 

     Tranquillement assis -plein de fatigue aussi- il dormit avant d’être réveillé par son impatience ; encore un peu et il aurait raté sa correspondance qui devait le conduire (après une vingtaine de minutes d’attente) quasiment au bout de son périple.

Un ultime trajet en car pour une quinzaine de kilomètres lui permit de plonger ses pieds dans le sable quelques secondes avant le premier coup de midi.

OUF !

 

     Épuisé il s’endormit pour cent ans et se réveilla à l’heure du goûter lorsque sa faim lui rappela qu’il avait oublié de manger depuis le déjeuner avalé rapidement un jour plus tôt.

La faute à pas de temps, trop de travail et le manque de considération portée à sa santé.

C’est en pleine digestion qu’il avait appris l’abandon de Laure qui s’était contentée de cinq mots joliment écrits sur une simple feuille Feuille de pense-bête « Je pars, je te quitte » tout bêtement épinglée sur la table de la cuisine ; s’était-elle méfiée des habituels courants d’airs de la maison ?!

Le temps s’était alors brutalement suspendu et la lumière s’était soudain éteinte.

Il était retourné s’asseoir devant son bureau, inerte et déconfit durant un long moment.

Le soir il avait repris conscience en se souvenant de l’annonce qui l’avait bouleversé au point de lui faire perdre pied ; l’hiver en plein été.

Il n’avait pas réellement été surpris ; elle avait simplement mis ses menaces à exécution…sans sommations.

Sans doute fatiguée par des mois d’errance et de désamour, elle avait préféré s’en aller la première ; nul besoin d’explications vaines.

Sans doute plus courageuse que lui aussi…

 

            Son unique réaction, sa seule hâte avait été de fuir ses tourments l’appartement et la ville.

Ne jamais revenir sur ses pas, ne pas ressasser le passé ; ne plus rêver à ce qui n’était plus.

Une année plus tard Vivaldi - Quatre saisons et autres... il s’était définitivement installé en bord de plage dans un chalet sur pilotis.

Il n’aimait plus.

 

 

Paris je t'aime… mais je te quitte 

(© 2015/droits réservés)

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Dans un autre siècle

Posté par BernartZé le 22 juillet 2015

Talkies-walkies

Grrrrr…

               

            - Allô tu m’entends ?

            - Presque comme si j’ te voyais Allô tu me vois bien Ɂ !

 

     Toujours de la friture sur la ligne quelle que soit la distance entre les deux émetteurs-récepteurs ; chacun à un bout de la rue nous avions l’impression de partir à l’aventure et à la conquête des ondes courtes…de très moyenne qualité.

Mais nous étions enfants et il nous fallait peu pour nous enthousiasmer.

En ces temps anciens l’invention des talkies-walkies nous paraissait aussi géniale que la maquette du LEM LEM et le premier pas sur la lune.

Le son et l’Espace…quelle gageure !

 

     Outre les grésillements, par temps clair nous pouvions entendre deux mots sur trois et capter par hasard les bribes d’une autre conversation ; question d’embouteillage sur la même longueur d’ondes !

Cela donnait subitement une autre dimension à notre rue qui semblait soudain s’étirer sur plusieurs kilomètres et notre jeu à deux voix empruntait d’autres routes plus hasardeuses ; quelle audace !

 

     Aujourd’hui tu n’es plus, mort trop jeune par inadvertance.

Même muni d’un smartphone dernière génération et du dernier cri Smartphone tu ne pourrais pas répondre à mon appel ni même m’envoyer le plus stupide des selfies.

Et tu devrais faire ta lessive et continuer à user d’un grille-pain pour tes toasts ; que la vie est mal faite !

 

            Il n’est plus l’heure de vivre,  l’enfance est morte.

 

     Plus de réponse sur latitude

 

 

Ondes sonores  Mort Shuman  

(© 2015/droits réservés)

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Autre…

Posté par BernartZé le 25 janvier 2015

Quai d’Anjou (1924 - Eugène Atget)

L’autre vie

  

            Je n’oublierai jamais toutes les scènes répétées sur le quai en contrebas.

 

     Sitôt l’escalier descendu Quai d'Anjou nous pouvions nous emparer de cet espace de Seine.

Le travail sur le texte était d’autant plus amusant que seul le fleuve nous faisait face ; seul témoin de nos efforts, seul spectateur.

Le bonheur d’éructer n’était jamais aussi grand que là !

Avant que d’être tempérés les mots bondissaient librement en tous sens sans mesure ; forcément outrés.

Nous pouvions alors embrasser toute l’Ȋle Saint-Louis Ȋle  Saint-Louis et tous les rêves étaient possibles.

Passé le temps de l’italienne et de l’allemande, l’heure la plus difficile était bien sûr de trouver la plus juste nuance sans perdre le bon rythme ; et de douter toujours…

Jamais satisfaits, quand l’incertitude finissait par prendre toute la place, le péril avant de retrouver le chemin de la classe virait à la crise d’angoisse.

Heureusement -en guise d’interlude- le passage nocturne d’un bateau-mouche Bateau-mouche nous donnait l’illusion d’un triomphe imminent sous les lumières et les spotlights Spotlights !

L’aveuglement ne durait pas…

 

     Quand il était temps de remonter en surface et de revenir à la réalité, le tract nous prenait avant même de franchir le porche 13 quai d'Anjou, avant même de passer sur scène.

Et les soirs d’examen…le malaise vagal n’était jamais très loin.

Certains s’en sortaient brillamment, d’autres moins et plus tard au café les mines réjouies côtoyaient les visages torturés.

Et tous n’allaient pas dîner ensuite…

 

     Tous n’ont pas poursuivi ce chemin, faute de persévérance de courage de talent ou d’opportunités.

Certains ont continué leur quête d’une autre manière, certains se sont égarés…

Tous ne recherchaient pas la gloire, mais la plupart une forme de reconnaissance vitale indispensable à leur (sur)vie.

Certains n’ont pas survécu.

 

            Je n’oublierai jamais toutes les scènes répétées sur le quai en contrebas.

  

 

En bas sur les quais (quai froid de la Seine par Bernard Buffet)

(© 2015/droits réservés)

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